vendredi 1 octobre 2010

Diodore de Sicile, Bibliothèque historique (IV, 48-49)



SUR LES ARGONAUTES (suite)

XLVIII.
« (...)
Après avoir approvisionné leur navire, les Argonautes prirent le large. Ils étaient déjà au milieu du Pont-Euxin, lorsqu'ils furent assaillis d'une tempête qui leur fit courir le plus grand danger. Orphée fit, comme auparavant, des vœux aux dieux de Samothrace, et les vents s'apaisèrent. On vit apparaître à côté du navire Glaucus, le dieu marin. Celui-ci accompagna le navire sans relâche pendant deux jours et deux nuits. Il prédit à Hercule ses travaux et l'immortalité. Il prédit aussi aux Tyndarides qu'ils recevraient le nom de Dioscures, et que tous les hommes leur décerneraient des honneurs divins. Enfin il appela tous les Argonautes par leur nom ; il leur dit que c'était par les vœux d'Orphée et par l'ordre des dieux qu'il leur apparaissait, pour leur découvrir l'avenir. Il leur conseilla, dès qu'ils auraient touché terre, de s'acquitter des vœux qu'ils avaient faits aux dieux auxquels ils devaient deux fois leur salut.


XLIX.

Glaucus replongea ensuite dans la mer. Arrivés au détroit de la mer du Pont, les Argonautes mirent pied à terre dans un pays dont Byzas était alors roi, et qui a laissé son nom à la ville de Byzance. Là, les Argonautes élevèrent des autels, accomplirent leurs vœux, et consacrèrent aux dieux un terrain qui est encore aujourd'hui vénéré par les navigateurs. Ils abordèrent ensuite dans la Troade, après avoir traversé la Propontide et l'Hellespont. Hercule envoya dans la ville Iphiclus, son frère, et Télamon, pour demander Hésione et les chevaux. Mais Laomédon fit, dit-on, mettre les envoyés en prison, et dressa des pièges à tous les autres Argonautes, pour les faire périr. Tous ses enfants concoururent à ce dessein. Priam seul était d'un avis opposé : il voulait qu'on gardât l'hospitalité envers ces étrangers, et qu'on leur livrât sa sœur et les juments promises. Mais comme personne ne l'écoutait, il apporta dans la prison deux épées, et les donna en secret à Télamon et à son compagnon. Il leur découvrit l'intention de son père, et devint la cause de leur salut ; car, après avoir tué les gardiens qui voulaient leur résister, Télamon et son compagnon s'enfuirent vers la mer, et ils apprirent aux Argonautes ce qui leur était arrivé. Ceux-ci se tinrent prêts au combat, et allèrent à la rencontre d'une troupe qui était sortie de la ville sous la conduite du roi. Le combat fut sanglant. Les Argonautes se signalèrent par leur bravoure. Mais Hercule les surpassa tous par sa valeur. Il tua Laomédon, prit la ville d'assaut et châtia tous ceux qui avaient trempé dans le complot du roi. Il donna le royaume à Priam, pour prix de sa justice. Il fit avec lui une alliance, et se remit en mer avec les autres Argonautes. Cependant quelques anciens poètes prétendent que ce fut sans les Argonautes qu'Hercule avait entrepris cette expédition avec six navires, pour demander les juments promises, et qu'il se rendit maître de Troie. Homère appuie par son témoignage cette opinion dans les vers où il dit : «Tel était Hercule, mon père, ce héros vaillant et intrépide, lorsque, réclamant les chevaux de Laomédon, il aborda ces rivages avec six vaisseaux seulement, et un petit nombre de guerriers, et qu'il saccagea la ville d'Ilion et en rendit les rues veuves d'habitants». Les Argonautes se rendirent de la Troade dans l'île de Samothrace. Là, ils accomplirent de nouveau les vœux qu'ils avaient faits aux grands dieux, et ils déposèrent dans le temple les coupes qui s'y conservent encore à présent. »

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